Retour sur « Theomania », le plus sombre et vénéneux opus de l'incontournable groupe Industrielo-Darkwave The cassandra complex, et analyse de leur discographie.
THEOMANIA (1988)
Voici probablement la quintessence du groupe formé en 1980 par Rodney Orpheus et faisant partie de l’écurie A play it again sam, cette petite maison de disque underground de Bruxelles déjà responsable des albums de Siglo XX (voir ma chronique sur cette magique et regrettée formation, par ici). A l’origine constituée d’un duo (Rodney Orpheus, avec Paul Dillion bientôt remplacé par Andy Booth à la guitare), The cassandra complex évoluera au fil du temps en accueillant John Galvin à la basse, Jurgen Jansen ou encore Patrick Gorden tous deux aux claviers (pour le disque Satan, Bugs Bunny & me... en 1989) et le bassiste/saxophoniste John Manchini pour ce Theomania. J’ai cru, à l’époque de ma rencontre avec cette formation, que la nationalité des musiciens était allemande ou hollandaise, voire peut-être belge (à cause de leur obscur et classieux label bruxellois à l’esthétisme très épuré qui prenait un malin plaisir à ne jamais donner d’informations sur les groupes qu'il signait). Mais non, le combo était tout bêtement anglais (classiquement anglais, si j'ose dire), originaire de Leeds et issus de la mouvance darkwave.
RODNEY ORPHEUS
The cassandra complex emmené par son leader Rodney Orpheus trouvera rapidement sa voie avec une musique originale, synthétique mais tenant à garder les bases instrumentales fondamentales de la guitare et de la basse électrique tout en usant largement de percussions électroniques annonçant la tendance dark et hard d'une partie de la mouvance électro des années 90. Souvent haletante et sombre, notamment dans son très bon premier album Grenade de 1986 (les excellents Presents come of age, Pick up, Power - voir la vidéo en fin de chronique -, et Report from the back), cette formation insolite ne fit pas l’économie de belles mélodies aux influences assumées (de Suicide aux incontournables Joy division en passant par les vétérans Kraftwerk et John Cale, avec un soupçon d’effets destroys à la Ramones).
Dans ce Theomania, deuxième opus sorti en 1988, l’équilibre s’avère parfait entre les morceaux harmonieux et introspectifs à la beauté ténébreuse (tel l’inoubliable titre One millionth happy customer ou encore l’émouvant Second shot) et ceux plus rythmés et sous grande tension (notamment l’impressionnant et indispensable Too stupid to sin évoquant le charisme du duo français regretté Kas product avec ses boites à rythmes obsédantes et sa guitare saturée façon Stooges du premier album). Les nombreuses sessions d’enregistrement de Theomania furent plus que mouvementées. Commencées à Bruxelles, elles s’interrompirent suite à un clash violent et définitif entre les musiciens. Rodney Orpheus fut donc contraint de rentrer au pays et de terminer son disque en Angleterre, seul, envers et contre tous. Mais peut-être est-ce par ces chemins tortueux et imprévus que naissent les grandes œuvres ?
TOO STUPID TO SIN, FOUDROYANT 3ème TITRE DE L'ALBUM THEOMANIA
L'EXCELLENT THE WAR AGAINST SLEEP (1992)
Suite à cette réussite indéniable Orpheus remania son groupe l’année suivante avec de nouveaux musiciens (l'allemand Volker Zacharias à la guitare) et poursuivit dans la même voie avec l’espiègle Satan, Bugs Bunny, and me…, nettement moins convainquant car donnant l'impression de répéter à l’infini une formule gagnante. Le titre ironique et vaguement humoristique n’arrangea d’ailleurs rien à l’impact mitigé que procura cet opus sur les auditeurs, malgré deux excellents titres se détachant du lot (le très pop City of dreams et le tube In search of penny century - voir les deux vidéos en fin de chronique -). L’insidieux doute s’installa chez les fans les plus pessimistes, mauvaises vibrations un peu dissipées par la livraison suivante (l'atomique Cyberpunx en 1990). Les deux opus de fin de contrat chez l’indépendant A play it again sam confirmèrent ce retour à l'inspiration. En effet, avec l'aéré The war against sleep en 1992 Orpheus décida de calmer le jeu, rangea les délétères armes de la dissonance, et renoua avec une pop énergique pour une collection de chansons imparables (les hits What can I do for you, She loves me, les touchants Awake all night et Tell me). Puis, Sex and death en 1993 impressionnera par l'ampleur de ses climats sonores, offrant une orientation plus que jamais darkwave/hard à la musique du combo et retrouvant la saine énergie des débuts (les pertinents The war against sleep, Realm of the senseless et Satisfy me, les imposants Come out, You make me sick, Kneel to the boss, Mouth of heaven - voir la vidéo en fin de chronique -). Malgré cette réussite l'album passa relativement inaperçu dans le contexte musical affligeant de l'époque. Sans maison de disques, Orpheus décida de mettre fin au groupe. Traversant un océan de sable brûlant durant sept longues années, il se consacra à l'écriture de textes poétiques ayant notamment pour thèmes la magie noire, et se spécialisa sur le sulfureux occultiste britannique Aleister Crowley. Avant de revenir en l'an 2000 sur le label américain Metropolis record avec les douze titres de l'album Wetware où l'adorateur des sciences occultes se contente de gérer le passé. Depuis, The cassandra complex s'est produit sur scène à intervalles très irréguliers dans quelques pays du monde, confronté à des fans nostalgiques mais aussi à de plus jeunes auditeurs. De cette aventure subsistent sept disques studios, une poignée d'E.P., et deux albums enregistrés live (sans overdub) qui démontrèrent toute la singulière densité/intensité du groupe sur scène (Feel the width en 1987, et l'ample Beyond the wall of sleep en 1992), témoignages d'un univers musical dark et mélodieux, parfois speed et agressif, et qui gagne à être connu en ces temps de formatages musicaux désespérants.
ONE MILLIONTH HAPPY CUSTOMER, 5ème TITRE DE THEOMANIA
ONE MILLIONTH HAPPY CUSTOMER (LIVE AT SÃO PAULO, BRAZIL)
SECOND SHOT, 7ème TITRE DE THEOMANIA - ICI EN LIVE (2007)
CITY OF DREAMS (SUR LE 3ème ALBUM SATAN, BUGS BUNNY, AND ME)
IN SEARCH OF PENNY CENTURY (SUR LE 3ème ALBUM)
NIGHTFALL [OVER EC] (SUR LE 4ème ALBUM CYBERPUNX)
WHAT CAN I DO FOR YOU? (SUR LE 5ème ALBUM THE WAR AGAINST SLEEP)
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