Le groupe pop underground Ivy, constitué de la chanteuse Dominique Durand (née à Paris mais exilée aux USA) et des deux flamboyants songwriters new-yorkais Andy Chase et Adam Schlesinger, nous propose avec ce Long distance fabuleux sorti à l'automne 2001 un disque d'une élégance et d'une magnificence rares.
16 ans de carrière, 6 albums (celui-là étant leur quatrième), 60 chansons, voilà des chiffres qui indiquent que ces esthètes ont pris leur temps pour composer et ont privilégié la qualité à la quantité. Leurs textes sont généralement en anglais, à part une reprise de Serge Gainsbourg très dispensable (L'anamour dans le disque Guestroom), mais l'accent français de Dominique Durand reste un atout pour le groupe particulièrement auprès des auditeurs américains, surtout ceux qui fantasment sur le Paris de l'après-guerre symbolisé par la Juliette Greco du Café de flore. Bien qu'ayant des fans dans le monde entier, ils ne sont bizarrement pas les chouchous de la presse française, ce qui après tout est plutôt un indice supplémentaire de qualité. Tous les morceaux de Long distance sont passionnants, mais le magnifique et troublant Edge of the ocean reste le moment fort de l'album, tout en demeurant sans nul doute l'une des dix plus belles chansons de l'histoire de la musique. Rien que pour elle, la possession de ce disque est indispensable (ce sera sous forme de CD, puisqu'il n'a hélas jamais existé en édition vinyle)… Personnellement, Edge of the ocean m'apporte la douceur, la fraîcheur vivifiante et l’insondable beauté que j'ai toujours recherchées dans la musique pop, dans une exigeante quête du Graal parfois décourageante ou frustrante : à savoir la chanson parfaite. Je vous laisse savourer ce petit bijou ci-dessous, via la version originale du disque sur la première vidéo à visionner en priorité, puis la version remixée sur la deuxième, nettement plus dynamique :
IVY - EDGE OF THE OCEAN (2001)
CLIP DE EDGE OF THE OCEAN (version remixée)
C’est notamment par ce petit chef-d’œuvre absolu au charme empli de douce mélancolie que je fais souvent le parallèle entre Dominique Durand et deux chanteuses pop mondialement célèbres qui illuminèrent ma vie d’enfant (puis de jeune adolescent) lorsque ébahi j’écoutais religieusement leurs 45 tours sur l’électrophone portable de mes parents à la fin des années 60. La voix et le charisme de la diaphane Dominique Durand m’apparaît en effet comme étant le résultat d'un chamaniste mélange entre ceux de Sandie Shaw (la chanteuse anglaise aux pieds nus) et ceux de la Françoise Hardy rêveuse des débuts. Preuves ci-dessous via deux chansons emblématiques, Ton meilleur ami et Tous les garçons et les filles pour Hardy (très beaux titres sortis en singles 45 tours 4 titres et issus du premier album de novembre 1962), et Had a dream last night pour Shaw (« J'ai rêvé de lui » pour la version française). Le lien entre les trois chanteuses me semble ici particulièrement évident. On y ressent la même inspiration rêveuse et solitaire, un certain désenchantement postmoderne, une certaine noblesse des sentiments. Une inspiration romantico-mélancolique d’essence baudelairienne. Les deux chanteuses des sixties sont devenues bien malgré elles des icônes pour les générations suivantes, notamment celles des années 80 et 90, revendiquées par des groupes new-wave et modern-pop anglais (les Smiths de Johnny Marr et Morrissey par exemple ou encore le français Etienne Daho). Elles restent le précieux témoignage d’une époque révolue dont la substance bienfaitrice heureusement subsiste au cœur de touchantes œuvres musicales et cinématographiques.
FRANÇOISE HARDY - TON MEILLEUR AMI (1962)
FRANÇOISE HARDY - TOUS LES GARÇONS ET LES FILLES (1962)
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